Billet d’humeur

par Michel Amathieu

par Michel Amathieu La Lettre AFC n°204

Le film d’Isabelle Breitman, No et moi, produit par Epithète, est le troisième film que je tourne avec cette réalisatrice.
Après les deux premières semaines de tournage qui se passaient très bien et un visionnement de rushes qui enthousiasmaient la réalisatrice, un week-end est passé par là et la collaboration est devenue très pénible, mon travail ne correspondant plus à ce qu’elle voulait.
Trois mois après la fin du film, elle m’appelle pour me faire part de sa décision de faire l’étalonnage numérique sans moi. J’ai donc contacté Frédéric Brillon, le producteur, qui m’a confirmé ce choix et le soutien qu’il apportait à sa réalisatrice dans cette voie. Ceci mettant fin à ma responsabilité de directeur de la photographie avant la fin de mon travail, j’ai donc décidé de retirer mon nom du générique et de l’affiche.
Avant le tournage, j’avais demandé à la production d’écrire dans mon contrat des conditions relatives à cet étalonnage et cela a été refusé. J’aurais dû me méfier davantage, mais en étant au 3e film avec cette même réalisatrice, je n’imaginais pas une telle situation. J’ai suivi l’évolution de la postproduction par l’intermédiaire de l’excellente postproductrice qui m’a toujours tenu informé de l’avancée des choses, malgré la tension entre la réalisatrice et elle.
Durant le mois de juin, période de l’étalonnage numérique, j’ai tenté de contacter l’étalonneur et les contacts commerciaux de cette société de postproduction afin de tenter de voir une copie ; visiblement, ils n’ont pas eu mes messages ou bien étaient débordés.
L’étalonneur, se confondant en excuses, m’a rappelé début juillet. Un des contacts commerciaux fin juillet.
Je ne les cite pas volontairement car quel que soit le prestataire, ce serait la même chose. Aucun prestataire ne prendrait part à un désaccord de ce type.
Les prestataires sont tout naturellement d’abord au service des producteurs, car ce sont eux qui payent. Rapport normal. Certains sont juste plus respectueux et vous rappellent.
Par chance, il est assez aisé de savoir en qui nous pouvons avoir confiance.
C’est effectivement très décevant de ne pas achever son travail mais cette situation ne m’est arrivée que deux fois ; pour L’Avion, de Cédric Khan et celui-là.
Tous les autres films auxquels j’ai participé, en France comme à l’étranger, se sont passés sans ce type de problèmes jusqu’aux copies et DVD, en gardant collaboration et confiance avec le réalisateur et la production.
En particulier, pour Lullaby avec Benoît Philippon, la postproduction s’est faite avec une grande complicité avec le réalisateur, le laboratoire et la production.
De même, lors des collaborations avec Emir Kusturica, et bien d’autres.
Pour No et moi, le tournage ayant été suffisamment pénible, j’ai préféré faire ce choix et surtout ne pas me prendre la tête plus que cela.
Grâce aux dialogues de l’AFC, nous savons que nous ne sommes pas isolés et que ces situations se multiplient.