Intermittents, les abus du service public

par Bruno Masi

La Lettre AFC n°129

L’auteur de ce document, Bernard Gourinchas, président de l’Association des employeurs du service public de l’audiovisuel (regroupant les dirigeants de chaînes de télévision et radios publiques), dresse un état des lieux. Désireux de " maîtriser l’avenir ou, plus modestement, empêcher le retour de mauvaises habitudes ", il établit trois constats principaux :
L’audiovisuel public recourt massivement à l’intermittence
En 2002, les salariés intermittents ont fourni 534 381 jours de travail aux neuf sociétés examinées (France 2, France 3, France 5, RFO, Arte, TV5, Radio France, RFI et l’INA). TV5 est l’antenne recourant le plus fréquemment à l’intermittence, avec 37 % du travail global fourni par les salariés non permanents, devant France 2 (27 %), France 3 (25 %) et RFO (24 %). Plus de 20 % du travail dans les neuf sociétés de l’audiovisuel public français est ainsi assuré par les intermittents du spectacle. C’est pour l’information que le recours à l’intermittence est le plus contestable. " Les journaux télévisés sont des pivots de la construction des grilles. Ils relèvent de l’activité normale et permanente de ces sociétés. "
Les intermittents travaillent plus que les salariés
Congés, RTT, récupérations... Le rapporteur évalue à 190 le nombre de jours travaillés par les 13 589 salariés permanents de ces sociétés, contre 220 à 230 réalisés par les salariés intermittents. M. Gourinchas ne préconise pourtant pas de " permanentisation massive ". La requalification en contrat à durée indéterminée, même si elle " règle des situations individuelles irrégulières ", ne permet pas de diminuer le " recours aux collaborations non permanentes ". Par ailleurs, l’augmentation du nombre des permanents augmente le risque de sous-emploi.
Il faut inventer des " formes contractuelles nouvelles "
Le contrat d’usage qui réglemente le recours à l’intermittence n’est pas adapté à " certaines productions installées dans la durée ". Mais CDD ou CDI ne semblent pas mieux convenir. Le rapport se prononce pour " une volonté politique claire ", susceptible " d’inciter les partenaires sociaux à négocier ".
(Bruno Masi, Libération, 15 janvier 2004)