On n’aura jamais assez parlé de Camerimage

Par Néhémie Lemal

La Lettre AFC n°281

Il fait froid, nous sommes à (nom de ville imprononçable) Bydgoszcz. Cette ville brumeuse dégage un charisme fantomatique. Les immeubles s’effritent et quelque part, dans ce patelin, se dégage de la chaleur. Je suis de retour à Camerimage.

Je suis avec mes amis de la Ciné Fabrique et de Louis-Lumière, on interview des chefs opérateurs autour de bières, et surtout beaucoup de sourires. On a soif de voir du cinéma, de voir beaucoup de films, de voir le Monde. Tandis que David Lynch, tout rieur, chuchote à ses fans que le cinéma, c’est fini pour lui, maintenant c’est les séries.

On a des rêves plein la tête, on est gonflé à bloc, on a la fureur de vivre alors on va voir les Français, comme la talentueuse Caroline Champetier, l’humble Pascale Lagriffoul, qui nous parlent de leur boulot passionnément avec le petit french accent.

On a juste le temps de passer voir la Music Video Competition, dans une salle pleine à craquer. Un public aussi réceptif que dans un concert d’AC/DC. Pluie d’applaudissements, personnes qui chantent et stand up. On a eu le droit à de belles surprises, beaucoup de créativité, comme avec le clip photographié par Stéphane Vallée, “One More Night”, ou “Leningrad - Kolshik“, d’Ilya Naishuller (DoP Genrih Meder).

On regarde les films étudiants et la rétrospective de John Toll avec des yeux attendris. On adore d’ailleurs le "teen movie" Almost Famous, de Cameron Crowe, et la fraîcheur de Sing Street, de John Carney.

On traverse la ville à la recherche de bonnes séances. Il se murmure étonnamment que First They Killed My Father, d’Angelina Jolie, est magnifique, qu’il faut à tout prix voir Loveless, d’Andrei Zvyagintsev, que Winter Brothers, d’Hlynur Pálmason, est le film de l’année et que The Happiest Day in the Life of Olli Mäki, de Juho Kuosmanen, est une grande surprise.

Le soir, on danse, on parle, on échange, on se passionne. On rêve d’un cinéma international, on oublie les frontières, on ne parle qu’une seule et même langue, le CINÉMA.

Sur la route pour rentrer, on traîne des pieds... On se rend compte que les artistes qui travaillent dans le cinéma sont des fous furieux, ils ont la fureur de vivre, la fureur de dire, ils veulent tout en même temps, ils ne baillent jamais et ne profèrent jamais de banalités, et ils brûlent, brûlent, brûlent comme des chandelles romaines dans la nuit de Bydgoszcz.

Dans l’avion pour la France, on a cette mélancolie qui nous vient, on se rappelle la chaleur des Polonais, on se souvient de la poésie de Bydgoszcz. Et des derniers mots tant répétés de Jacques Delacoux : « Restez en contact, le Cinéma d’aujourd’hui est mondial ».
Alors, avec amertume on ferme les yeux et on se dit qu’on aimerait bien y retourner, à Camerimage.

Néhémie Lemal est étudiante en 2e année Image à la Ciné Fabrique.
Six étudiants de l’Ecole Louis-Lumière et six de la Ciné Fabrique étaient invités, avec d’autres, à Camerimage par Transvideo et K 5600 Lighting.

Dans le portfolio ci-dessous, quelques photographies prises à Bydgoszcz par Tsiorisoa Andriandalaoarivony et Néhémie Lemal