Relief : la technologie est là, mais l’équipement tarde

par Isabelle Regnier

Le Monde, 1er avril 2009

La technologie du cinéma en relief 3D sera-t-elle le nouvel eldorado d’Hollywood ? C’est ce que veulent croire les studios. Quatre d’entre eux (Disney, Universal, Paramount et Fox) ont signé, en mars, un accord pour subventionner la conversion de dix mille salles de cinéma à la projection des films en vue stéréoscopique, dite Tru3D (3D réelle).

Alors que plusieurs films utilisant cette technique vont déferler sur les écrans (Avatar, de James Cameron, Up, nouveau film du studio Pixar programmé en ouverture du Festival de Cannes le 13 mai, le Tintin de Spielberg), la majorité des salles n’a pas fait l’acquisition du coûteux équipement de projection nécessaire pour rendre l’effet de relief. Celui-ci doit s’accompagner d’un investissement en logistique : les lunettes de visionnage ne sont plus en carton, comme dans les années 1970-1980, mais en dur.
Les salles les prêtent aux spectateurs puis les récupèrent après la projection, pour les nettoyer et les désinfecter avant de les remettre en circulation.

Premier film d’animation intégralement réalisé en Tru3D, Monstres contre Aliens est sorti au Etats-Unis sur 7 000 copies, mais seulement 2 000 salles l’ont montré ainsi. Selon Roger Pollock, vice-président de la distribution internationale chez Paramount, la situation crée un manque à gagner, le taux de remplissage étant supérieur dans les salles proposant le film en relief.
En France, où seulement 74 salles sont équipées, Monstres contre Aliens sort sur 800 copies, dont 40 en Tru3D (dans certaines salles, le prix du billet pourra être majoré de 1 ou 2 euros). Les copies sont par ailleurs toutes en version française. Selon Roger Pollock, le calage des sous-titres sur des images en relief est une opération délicate que les studios ne maîtrisent pas encore, mais dont ils devraient venir à bout d’ici à quelques petits mois.

Etre totalement dans le film
Le vice-président de Paramount veut croire que la révolution du relief 3D sera du même ordre que celle entraînée en son temps par la couleur. Les effets indésirables des lunettes aux verres rouge et bleu (nausée, maux de tête...) ne sont plus d’actualité, avance-t-il, et le spectateur peut pleinement jouir de l’impression d’être totalement " dans le film ". « Je pense qu’au cours des années à venir une grande majorité de films sera disponible en 3D. Les gens auront leurs propres lunettes, peut-être même utiliseront-ils les mêmes que pour aller à la plage. »

Chez DreamWorks, le coût supplémentaire induit par la 3D est de l’ordre de 15 millions de dollars par film, somme considérée comme marginale en regard de l’accroissement du nombre d’entrées attendu en retour.
Les studios voient aussi dans cette technologie un moyen efficace de lutter contre le piratage. Sans lunettes, l’image à l’écran est floue. Filmée depuis la salle de cinéma, elle le restera.
(Isabelle Regnier, Le Monde, 1er avril 2009)