Comme une fleur

Jacques Maillot, réalisateur, SRF

La Lettre AFC n°233

Donc, en fait, on arrive comme des fleurs en ayant réfléchi un petit peu pendant quinze jours, en ayant rédigé un truc, et on le propose à des gens qui ont négocié pendant sept ans. Donc rien que pour ça, on va se faire retoquer.

Parce que, si moi j’étais membre d’un syndicat de techniciens, je serai fou furieux quoi, je serais fou furieux parce que, on balaie mon travail de sept ans, et on vient dire à tous les autres ce qu’il faut faire parce qu’on s’est autoproclamé spécialiste sous le prétexte qu’on a fait deux ou trois films et qu’on a un petit nom... C’est hyper paternaliste, et c’est pour ça que c’est un truc patronal que vous le vouliez ou non, même si vous ne vous définissez pas comme des patrons… (...)
Ensuite, votre texte il a un énorme défaut, c’est qu’il fait une photographie de la situation actuelle en disant : « On va la pérenniser ». Or la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Vous entérinez le fait qu’il y a un cinéma à plusieurs vitesses, alors que la SRF s’est toujours battue contre cet état de fait. Sans avoir tout le temps du succès, forcément, mais en rappelant toujours qu’un film égale un autre, qu’un réalisateur égale un autre. Et donc, vous, en pérennisant cette répartition des salaires suivant les films, et en les fixant définitivement, en fait, vous, vous faites une photo de la situation présente et vous conduisez à la reproduire, ce qui est très dangereux parce que la situation présente est très insatisfaisante.

Voilà donc ça, c’est les deux choses principales qui, à mon avis, sont des obstacles à une résolution des problèmes dans ce que vous proposez. Et ensuite, comme le combat n’est pas mené à l’endroit juste, on laisse de côté les combats qu’il faudrait mener. Et je pense qu’il y avait une occasion politique unique avec cette Convention collective, c’était de dire : « Cette Convention collective elle a été votée normalement, elle doit s’appliquer ». Et donc il fallait obliger Filippetti, qui est une ministre socialiste, à dire : « vous voulez respecter la justice sociale, ne le faites pas au détriment de la diversité, et donc, acceptez de remettre sur la table les vrais problèmes du cinéma et du cinéma indépendant qui sont : l’inflation du nombre de copies pour les gros films, la répartition inéquitable du fonds de soutien, la non-transparence des recettes des films et l’absence de clause de diversité pour les chaînes de télé.

AG de la SRF, 15 juin 2013