Étude de cas FilmLight : "Mank", de David Fincher, photographié par Erik Messerschmidt et étalonné par Eric Weidt

Recréer le Hollywood des années 1930 pour Mank, le nouveau film Netflix de David Fincher

par FilmLight Contre-Champ AFC n°316

Mank est le biopic très attendu de Netflix, réalisé par David Fincher. Le film est raconté du point de vue du scénariste alcoolique hollywoodien, Herman J. Mankiewicz, alors qu’il se bat contre ses propres démons pour terminer le scénario du célèbre Citizen Kane, d’Orson Welles.

David Fincher et son équipe ont travaillé avec le système d’étalonnage Baselight de FilmLight depuis le film de 2008 L’Etrange histoire de Benjamin Button et la série télévisée Netflix "House of Cards". Et c’est avec Mindhunter de Netflix que le réalisateur a créé sa propre société de postproduction à Hollywood. L’étalonneur Eric Weidt est en charge du département couleurs du studio, et s’appuie sur le système Baselight X acquis par D. Fincher. Précédemment, E. Weidt avait développé des profils d’émulation de films personnalisés pour des photographes ; il apporte une vaste expérience en postproduction dans le domaine des photos de mode et de films.


Entièrement tourné en noir-et-blanc, Mank a une atmosphère hollywoodienne des années 1930. De nombreux essais ont été effectués avant la prise de vues – de caméras, d’objectifs, même d’ampoules – avant qu’Éric ne développe des LUTs HDR, SDR et de nuit américaine aux côtés du chef opérateur Erik Messerschmidt. D. Fincher voulait recréer certains éléments d’époque en postproduction, par exemple le "noir vaporeux" dans les ombres.
« Lors des tests, nous avons développé le look en 6K dans le Baselight, puis nous avons demandé à Fotokem d’en faire un "shader" », a expliqué E. Weidt. « Ainsi, l’impression d’époque a même été intégrée depuis les rushes. »


D. Fincher et E. Messerschmidt ont opté pour une caméra monochrome en raison de sa sensibilité à la lumière. Cependant, cela signifiait que dans la salle d’étalonnage, Eric Weidt n’avait aucune information chromatique avec laquelle tricher. « Erik Messerschmidt a fait de beaux choix, filmant avec un filtre orange pour les ciels plus sombres, par exemple – et nous avons eu des segments entiers tournés en nuit américaine qui étaient un réel plaisir à étalonner. Ces derniers n’avaient pratiquement pas de grain après l’étalonnage jusqu’à ce que nous en remettions un peu. »
Pour cela, Eric a utilisé la fonction "Add Grain" de Baselight pour que l’effet soit dynamique tout au long de chaque prise de vues, visant ainsi la non-linéarité des effets optiques. Weidt a également joué un rôle central en recréant d’autres éléments de look des années 1930 dans la salle d’étalonnage.


« David Fincher voulait vraiment des références d’époque – "noir vaporeux", "blanc vaporeux", adoucissement des franges, "fondus optiques" », a expliqué Eric. « Ils ont fait quelques fondus d’ouverture à la camera, et m’ont demandé de reproduire la manière dont la lumière est intensifiée et contrastée pendant le fondu vers et depuis le noir. »
« Personnellement, j’adore le noir-et-blanc. C’est incroyable à quel point nous pouvons faire cela avec 14 diaphs de latitude. »


Un des autres défis rencontrés par Eric était la fumée qui avait été utilisée pour créer une atmosphère sur le plateau. « L’absence de couleur signifiait la mise au point de moyens toujours plus intelligents pour équilibrer la fumée – par exemple, demander que les canaux alpha des VFX existants soient transmis. Mais au-delà de ça, cela a impliqué beaucoup de suivi », explique E. Weidt. « Il est intéressant de noter que nous avons ramené beaucoup de fumée après l’avoir déjà apprivoisée. »
Eric a utilisé une pléthore d’outils Baselight pour obtenir le look – tels que Base Grade, Paint, Texture Equalizer et Add Grain – mais il s’est également appuyé sur les fonctionnalités Color Space Journey, Cursors View, Gallery et les puissantes fonctionnalités de gestion des formats de Baselight.


Il a également beaucoup collaboré avec le département VFX, principalement parce que de nombreuses demandes peuvent désormais tomber dans l’un ou l’autre département. « Baselight est pratiquement devenu un outil de composition à part entière, ce qui apporte d’énormes avantages en termes de flexibilité. Les changements deviennent une question de clics », déclare E. Weidt. « Mais certaines tâches peuvent commencer modestement et prendre de l’ampleur – et certains plans nécessitent également des interventions de différentes personnes. Nous nous sommes donc réunis régulièrement pour revoir le travail ou l’ordre des opérations. »


Pour David Fincher, Mank est un projet qui lui tenait à cœur car le scénario a été écrit par son défunt père, Jack Fincher. Il a tenté de faire le film pendant de nombreuses années, et la sortie de Mank coïncide avec le 79e anniversaire de la sortie en salles de Citizen Kane.

Mank est maintenant sur Netflix.

Messages

  • Merci beaucoup pour votre réaction à notre article, il est toujours encourageant de voir des points de vue différents sur ce que l’on peut appeler le processus de création artistique, ou plutôt sur la revendication de cette création.

    Je suis tout à fait d’accord avec vous, nous aurions pu faire une interview avec Erik Messerschmidt, celui-ci nous aurait beaucoup appris sur son travail qui a été intense sur ce film (je vous invite à lire de très nombreux documents sur ce sujet) mais contrairement à ce que vous dites, ce n’était pas le sujet de cet article.

    Comme vous le savez peut-être, nous sommes une société qui développe des scanners films et des outils d’étalonnage numérique en collaboration avec de nombreux étalonneurs et post-producteurs, nous sommes certainement dans notre domaine la société qui est la plus proche des directeurs de la photographie par notre démarche de développement d’outils en concertation avec beaucoup d’entre eux. Nous avons fait le choix de parler de la création artistique de l’image comme un travail d’équipe plutôt que comme celle d’un "premier violon". Cela n’enlève rien au travail extraordinaire d’Erik Messerschmidt mais pourquoi ne pas parler du travail artistique d’Eric Weidt, son étalonneur ? Parce que c’est un second violon ?

    Le métier d’étalonneur a beaucoup évolué, il est aujourd’hui plus que jamais intégré avec le directeur de la photographie dans cette phase de création, et dans ce cas précis, David Fincher fait partie des réalisateurs les plus exigeants en termes d’images et certainement un de ceux qui interviennent le plus à l’étalonnage, devons-nous taire ces pratiques, je ne pense pas.

    Maintenant, je suis d’accord avec vous que nous avons pour l’instant publié surtout des articles avec des étalonneurs et leurs réalisateurs. Nous sommes actuellement entrain de faire des d’interviews croisées entre des directeurs de la photographie et leurs étalonneurs, qui, je l’espère, seront vous faire entendre cette petite musique qu’il ne tient qu’au premier violon de faire sonner !

    Très cordialement,

    Matthieu STRAUB | FilmLight

  • Un article qui me fait bondir !
    Cet article commence par Fincher et son équipe... oups, qui a fait l’image. Serait-ce juste un détail de citer le cinematographer ?
    Il est mentionné plus loin certes pour nous dire qu’il a mis un film orange et qu il a fait des nuits américaines... top donc son apport au film... mais peut-être un peu juste non... Mais son apport à l’étalonnage... le sujet de l’article... rien ..?....
    Il aurait été bon de lier cet article à une interview d’Erik Messerschmidt et de lui demander comment il avait imaginé ces nuits américaines en noir et blanc avant l’étalonnage numérique. Peut-être avait-il revu celles de James Wong Howe sur La Vallée de la peur, pour moi dans les plus belles de l’histoire de la cinématographie.
    En fait tout cela pour vous dire que j’en avais un peu marre des articles où la place centrale artistique est juste accordée au réal.
    Je pense que vous devriez plus promouvoir l’apport artistique du cinematographer et de son propre jugement par rapport au scénario (ses recherches, ses choix au tournage, etc.)
    Alekan disait qu’il n y avait pas de mauvais cadre... il suffisait qu’il l’éclaire à sa manière pour le rendre artistique et intéressant et je pense qu il ne demandait pas toujours son avis au chef d’orchestre...
    ... Être premier violon, c’est assumer son timbre, sa technicité pour magnifier la partition.
    Allez, un petit effort, recentrez vos questions et faites-moi entendre cette petite musique...
    Cordialement,
    Pascal Rabaud