Le pétrole et les idées

Par François Reumont

La Lettre AFC n°298

« En France, on n’a pas de pétrole mais on a des idées », proclamait crânement un slogan de 1976 devenu proverbial. C’était le premier choc pétrolier et le gouvernement sortait une campagne de spots publicitaires accompagnant le changement d’heure et diverses mesures d’économies d’énergie.

Des inventions donc, c’est ça dont la France pouvait être fière et, pour moi, le modèle de l’inventeur français, c’était Jean-Pierre Beauviala avec son béret, ses écharpes et son air malicieux. Son nom était un mythe pour tout aspirant à fabriquer des sons et des images animées. Charger les magasins de la LTR… mes premiers pas avec la prise de vues ciné rue Lhomond, dans le studio qui nous servait à Louis-Lumière pour les travaux pratiques.
Plus tard, je me souviens le solliciter pour le deuxième guide image et passer lui rendre visite en Isère. Il est alors en plein travail sur le scanner film Aäton K (un des premiers en 4K). C’est le début des années 2010 et le tournant du numérique se confirme. Il est confiant en ses projets mais soucieux car les sous-traitants ont de la peine à suivre le carnet de commande. On déguste avec Martine, Franck et l’ensemble de l’équipe une tarte du Champsaur à la myrtille que j’ai pris la coutume de ramener à chacun de mes passages rue de la Paix.
Au Micro Salon 2012, une salle comble vient voir les premières images de la caméra Delta. Fidèle à lui-même, il vient avec son béret et son écharpe présenter son propre concept de caméra numérique. Malheureusement l’aventure des caméras Aäton s’arrêtera là.

Le 16 avril 2019, Jean-Pierre Beauviala a été enterré face aux montagnes dans le petit village alpin de Mens où il s’était établi depuis des années. Le café de la place, devenu son repaire, portait une jolie photo de lui à l’entrée.
C’est là où ses proches, voisins, anciens d’Aäton et quelques passionnés du son et de l’image cinéma sont venus lui rendre un dernier hommage.
43 ans plus tard tout fout le camp. L’heure d’hiver va disparaître, le pétrole sans doute aussi.
Jean Pierre va nous manquer pour redoubler de nouvelles idées !

Au revoir JP.