Max & Co.
Paru le La Lettre AFC n°173
38 semaines de tournage, 27 plateaux occupant une surface de 4 500 m2 à Romont, jusqu’à 130 collaborateurs en Suisse pour les décors, l’animation, le tournage, le montage et la production, 80 à Manchester (chez Mackinnon & Saunders pour la fabrication des marionnettes), 20 en Belgique pour les effets spéciaux, une dizaine en France pour la musique et le son.
Les frères Guillaume avaient cosigné plusieurs courts métrages d’animation et créé avec Benoît Dreyer la société Cinémagination.
Le projet initial de Max & Co., moyen métrage d’une vingtaine de minutes évolue rapidement, sous la houlette du producteur Robert Boner, et s’apparente davantage à la fiction qu’à de l’animation classique avec la collaboration d’Emmanuel Salinger et de Christine Dory à l’écriture du scénario, celle de Renato Berta à l’image, Bruno Coulais à la musique et Jacques Comets au montage. (Isabelle Scala)
Je m’interroge toujours lorsque de jeunes réalisateurs me proposent leur premier film en raison du décalage d’expérience qu’il peut y avoir.
Or c’était la première fois que je faisais un film d’animation, j’arrivais sur un terrain nouveau, tout comme Samuel et Frédéric Guillaume qui étaient confrontés pour la première fois à la réalisation d’un long métrage. Nos expériences se sont complétées.
Ce qui me tentait, c’était également le fait d’avoir tout à inventer, de travailler sur la conception d’un univers, sur le découpage et de participer pleinement à son évolution, de partir du noir complet, d’avoir tout à créer, en se reposant sur les éléments imaginés par Samuel et Frédéric.
L’une des contraintes était de faciliter au maximum le travail des animateurs. Le studio Cinémagination à Fribourg a développé un logiciel, l’Animotion, qui calcule, permet de reproduire et de décomposer les mouvements de caméra, les sources lumineuses, de gérer les captures, la transformation des images, de les mettre en séquences, de gérer en réseau tous les plateaux. Réalisation, décoration, lumière, nous avons tous participé, avec les informaticiens, à la création de ce logiciel et à des _
améliorations durant le tournage, un outil simple à utiliser, concret, rapide, permettant aux animateurs de se concentrer sur l’animation pure, sans être freinés par une lenteur technologique que l’on retrouve habituellement sur ce genre de tournage.

(Photo Jean-Paul Toraille)
Découpage et volume des décors ont été conçus en même temps : on allait chercher les éléments de décor dans la bibliothèque d’un programme destiné aux architectes, Sketchup, logiciel de modélisation 3D permettant d’organiser " les grandes lignes d’une séquence ", de positionner les cadres, les places des personnages, tout en restant évidemment dans le domaine du virtuel.
Ces données ont ensuite été importées dans un programme 3D plus élaboré, Maya, qui permet d’affiner les mouvements de caméra et l’animation des personnages virtuels : mais la chose très importante à cette phase, c’est d’ajouter sur ces images les dialogues préalablement enregistrés avec les comédiens. Par la suite, Jacques Comets pouvait faire son montage.
Et toujours sur la base de ces images, l’équipe décoration pouvait commencer à dessiner les décors et concevoir avec la mise en scène tous les accessoires.
La mise en place des plans et l’élaboration de la lumière se faisaient de façon relativement classique et l’on enregistrait les positions de la caméra et la conduite lumière dans le programme Animotion. Nous avons " tourné " avec des appareils photo numériques en 4K. Le transfert s’est fait en 2K chez Arane pour une question de gestion de la taille des images, trop lourdes.
On " tournait " avec un diaph de 11 et on a joué sur le temps d’exposition, généralement entre le 30e et le 1/4 de seconde, mais parfois jusqu’à 6 secondes.

Le souhait photographique des réalisateurs était d’être très " réaliste ", j’ai pris quelques risques intéressants dans des ambiances ensoleillées. On ne pouvait pratiquement pas mettre de lumières d’appoint ou de face dans le périmètre autour de la caméra, et cela pour permettre aux animateurs d’avoir accès facilement aux personnages sans que les installations lumière soit un obstacle.
Les deux principaux problèmes auxquels nous avons été confrontés étaient liés à la stabilité dans le temps. Etant donné que la durée de prise de vues d’un plan pouvait s’étaler sur plusieurs jours, la moindre variation de tension de l’alimentation électrique entraînait une variation de densité, problème que nous avons résolu en passant tout le système d’alimentation sur onduleurs. De plus, les variations de température sur les plateaux entraînaient une très légère variation des dimensions des décors, évidentes surtout entre le soir et le lendemain matin. Un animateur tournait en moyenne entre 2 et 2,5 secondes utiles par jour. Et pour pouvoir tourner dans des délais raisonnables (38 semaines de tournage), on a dû gérer jusqu’à 27 plateaux de différentes dimensions.
Pour conclure, autant l’ordinateur a été pendant la phase de préparation notre outil principal, autant, pendant le tournage, il était l’" assistant privilégié " sur lequel on s’appuyait, laissant au travail artisanal de mise en scène, d’animation et de lumière une place essentielle à la création.
Les assistants : Séverine Barde, Jean Paul Toraille, Roger Paul Tizio
Chef électro : Jean-Claude Lebras
Chef machino : André Haidant



