Retour sur le séminaire "Protégez vos intentions créatives avec ACES"
Par Clément Colliaux, pour l’AFC« A l’heure du numérique, ACES est le nouveau standard pour s’assurer un color managment cohérent », ouvre Ronnie Prince, éditeur en chef de Cinematography World et modérateur de la conférence. Le consultant workflow Miga Bär rappelle ensuite l’importance d’avoir un espace couleur plus large par lequel transiter, entre le signal envoyé par la caméra, les moniteurs du village vidéo, du montage, de l’étalonnage, les VFX et le support final. L’Academy Color Encoding System (ACES) englobe tous ces autres espaces couleurs. Les différents signaux peuvent donc entrer dans l’espace ACES via un Input Transform, et sortir via un Output Transform une fois l’étalonnage effectué, ce qui limite drastiquement les pertes qu’occasionneraient des transitions successives entre des espaces restreints. « Jusqu’à l’étalonnage, on utilise des formats qui ne sont pas faits pour être affichés », poursuit Bär. « On les regroupe en tant que Scene Referred, par opposition aux supports Display Referred pour la diffusion. Et ACES fait le lien entre les deux au moment de l’étalonnage. »
« Le mieux pour s’assurer un bon monitoring, c’est de fabriquer un show look », conseille Bär. « Il faut donc partir de la fin et, à partir des tests maquillage et costumes, élaborer à l’étalonnage ce à quoi on voudrait que l’image ressemble. Ce show look va suivre toute la ligne sans jamais être burn in de façon irrémédiable. Il est très important de s’y référer : si par exemple un plan revenu des VFX sort du lot en termes de couleurs ou de contraste, le monteur aura tendance à moins l’utiliser pour ne pas sortir du film. » Il passe la parole à Patrick Renner, qui travaille pour les développeurs de logiciels Pomfort. « Contrairement à une LUT (Look Up Table), qui ne fonctionne que pour un certain type de fichier, le show look, grâce à ACES, peut transiter entre toutes les sources. » Il le démontre en appliquant à une source vidéo arrivant en SDI le style qui avait été établi à partir d’une photo, en sRGB. « Avec le logiciel Livegrade, on peut importer ce look en fichier AMF, et même l’ajuster à la volée pour correspondre à une scène, une exposition ou une météo différente. » Il rappelle qu’aucune de ces extensions de fichiers ne sont propriétaires, et peuvent fonctionner avec n’importe quel équipement. « Contrairement à ce que certains craignent, les Transform ACES n’uniformisent pas le rendu d’images de sources différentes. Ils font en sorte qu’ils se comportent ensuite de la même manière lorsqu’on les manipule. »
« Avec la multiplication des sources et des écrans différents sur un plateau, la gestion de la couleur est inévitable, et ACES est la meilleure façon de s’y prendre, dès le début de la chaîne », synthétise Miga Bär. « C’est le meilleur moyen d’éviter des appels paniqués à six heures du matin ! », énonce le chef opérateur Franz Pagot, AIC, OMRI, MBKS, qui a eu son lot de mauvaises expériences avec des LUTs. Les étalonneurs du panel élargissent ensuite l’avantage d’utiliser ACES : Michal Herman explique qu’ACES fonctionne très bien pour mêler numérique et rushes en pellicule scannés via le système, et Felix Hüsken, BVK, CSI, raconte la latitude que le système lui a apportée pour gérer des images avec beaucoup de lumières néon sur la série "How to Sell Drugs Online (Fast)" (2019). Patrick Renner ajoute qu’ACES permet sans difficulté de passer d’une chaîne en SDR à une diffusion en HDR, avec une fiabilité de 90 %. Enfin, conclut Kamil Rutkowski, directeur technique chez DI Factory : « ACES permet de naviguer entre des workflows différents, que nos écrans soient en P3, sRGB… Et surtout, sa grande latitude permet de faire des masters – notamment d’archives scannées – qui seront compatibles avec les futurs espaces couleurs qui vont apparaître. »
(Compte rendu rédigé par Clément Colliaux, pour l’AFC)