S’armer face à la mondialisation

par David Kessler, directeur général du CNC

La Lettre AFC n°110

Quand des films comme Monsieur Batignole ou Amen réalisent 1,5 million d’entrées, c’est un signe. En revanche, les films américains de niveau moyen ne marchent plus vraiment.
Le phénomène n’est pas purement éphémère et il reflète un vrai appétit de cinéma français. En 2001, 30 films de plus ont été produits alors que dans la même période la manne financière globale n’a pas augmenté. Cette tension du marché en 2002 est aussi liée à la crise des rentrées publicitaires des diffuseurs et au fait que Canal+ est devenu plus restrictif sur les montants investis dans les films. S’ajoutent des inquiétudes plus lourdes, plus structurelles et de plus long terme, notamment sur la stratégie de Canal+.
L’actionnaire est-il réellement attaché au système français ? Le rôle des pouvoirs publics est de rappeler au président de Vivendi Universal les engagements qu’il a pris.

L’opération Vivendi Universal a été acceptée sur cet engagement et non sur une remise en cause de ceux de Canal+ par rapport au cinéma français ! Les événements survenus à Canal+ montrent que les secteurs de l’audiovisuel et du cinéma n’échappent pas aux turbulences de la mondialisation : comment assurer l’existence d’une production forte et indépendante ? Comment garantir le financement du système ? Comment continuer à privilégier la création et les contenus ? Tels sont certainement les défis de l’avenir. Globalement, il existe un besoin de financement complémentaire. Le système actuel n’absorbe pas tous les films. Plusieurs sources sont envisageables :
- Les succès du cinéma peuvent attirer des financiers qui avant n’y voyaient qu’une activité à risque. Un certain nombre de produits financiers sont donc envisageables.
- La fiscalité : les Sofica n’arrivent-elles pas en bout de course ?
- Les financements régionaux pourraient être développés.

  • L’international : trouver des financements complémentaires dans les coproductions européennes.
    - La télévision à péage : son développement devrait permettre, par le jeu des minima garantis, un accroissement des financements.

La perspective européenne est certainement au cœur de l’avenir du système. La vraie difficulté, pour faire exister un cinéma européen, c’est l’absence de volonté politique dans les différents pays européens.
(Propos recueillis par Marie-Claude Arbaudie et Sarah Drouhaud, Le film français, 26 avril 2002)