"Ten Reasons Why Film Never Die"

Par Brian McKernan, co-fondateur de Digital Cinema Society

La Lettre AFC n°185

On a tous eu à lire, à un moment ou un autre, des articles de presse annonçant haut et fort « la mort du film (argentique) ». Les auteurs de ce genre d’articles s’emballant sur le fait qu’un film particulier ait été produit en numérique, et dans la foulée, concluant que pour la pellicule film, l’heure de la retraite avait définitivement sonné. Oubliant au passage que tous les films qui, à ce moment-là, font de la publicité dans ces mêmes journaux, ont été tournés et sont projetés en 35 mm.

Ces informations ne sont pas seulement fausses, elles oublient de considérer l’importance de l’esthétique cinématographique et le rôle des directeurs de la photographie qui sont les garants de la qualité de l’image, que se soit sur support film ou sur quelconque autre media.
Ces informations erronées touchent aussi au respect que l’on devrait, au moins, avoir pour le principal support sur lequel a été enregistrée, stockée, et transmise, l’image animée depuis la naissance de la cinématographie. La mentalité du "soit l’un, soit l’autre", argentique contre numérique, n’est pas seulement de courte vue, elle cache aussi le fait que la notion de "numérique" peut se décliner avec de nombreuses spécifications différentes.

Le numérique peut se référer : à une variété de formats d’acquisition (HDCAM, DVCPRO-HD, 4:4:4 Filmstream, etc.) ; à une suite d’outils de création pour la postproduction d’images tournées sur support argentique (Digital Intermediate) ; ou à la conversion de ces images sur un autre format d’exploitation (MPEG-2 par exemple).
Ne vous méprenez pas sur mes propos ; les nouvelles technologies de cinéma numérique ne sont rien moins qu’une révolution dans la boite à outils des cinéastes. Mais ce n’est pas parce qu’il y a maintenant des technologies alternatives pour tourner des films que le tournage sur support argentique est mort.
L’apparition du numérique ne signifie pas : mort de l’argentique tout comme celle de la télévision n’a pas voulu dire mort de la radio ni désertion des salles de cinéma.

Avec tout ceci en tête, considérons maintenant la liste des raisons pourquoi le film (argentique) ne mourra jamais.
1°) Cette technique fonctionne parfaitement ; (ce qui est prouvé depuis longtemps). Le matériel de tournage est largement disponible, adaptable, léger, ne s’encombre pas d’une multitude de câbles ni d’unités d’enregistrement et est fiable dans à peu près toutes les situations. Les accessoires sont nombreux et variés.

2°) Malgré les différents formats d’image et d’enregistrement audio, le film 35 mm est le seul format de production d’images animées étant au standard universel (mondial).

3°) Il y a plus d’un siècle d’archives mondiales stockées sur film, ce qui représente une part essentielle du patrimoine culturel des temps modernes. Le transfert de toutes ces archives sur un support électronique serait d’un coût prohibitif. Et pourquoi se compliquer la vie quand on peut transférer ce dont on a besoin, quand on en a besoin sur le format vidéo ayant cours ce jour-là ?

4°) Les formats vidéo deviennent très vite obsolètes. Le format 35 mm existe depuis plus d’un siècle.

5°) La qualité des pellicules film continue de progresser (Kodak, Fuji, Agfa).

6°) Les techniques numériques de transfert et de restauration des films argentiques se développent et permettent maintenant de révéler des détails qu’il était impossible de discerner auparavant dans ces images.

7°) La durée de vie des informations stockées sur support film est aujourd’hui estimée à au moins un siècle. Qu’en est-il de la stabilité des bandes magnétiques et autres supports ?

8°) Le scan numérique des films, les inter numériques (Digital Intermediate), l’étalonnage numérique et les options de kinescopage augmentent la viabilité du film argentique.

9°) La pellicule film a une meilleure définition que la HD. Le film a une plus grande plage dynamique. Les caméras film sont bon marché. Un film développé peut être lu à l’œil nu.
Le film offre des couleurs sans avoir besoin d’un prisme séparateur de couleurs ni de filtres colorés, les deux diminuant la sensibilité et le dernier réduisant la résolution et apportant des artefacts.

10°) Le film argentique est, réellement un medium numérique (les grains sont soit exposés, soit non exposés). La structure du grain est aléatoire, il n’y a donc pas de problèmes d’alias sur un capteur.
En outre, la structure du grain est différente d’un photogramme à l’autre, il n’y a donc aucune possibilité de permanence de pixel défectueux ou d’empreinte de bruit thermique. Et la caractéristique du transfert du film est ce "film look", si envié, que le 24p HD essaie de l’imiter.

Encore une chose : viabilité du film ne veut bien sûr pas dire pour autant mort du numérique, mais qu’il y a de plus en plus de nouveaux outils pour faire des images animées, qu’il n’y en avait auparavant. Choisissez ceux qui, à vos yeux, sont les meilleurs et ne vous laissez pas induire en erreur par certains articles de journaux douteux.

Copyright 2004-2009 Digital Cinema Society

(Article traduit de l’américain par Richard Andry)