Où l’on parle du travail du directeur de la photographie Georges Lechaptois sur "Augustine" d’Alice Winocour

Venant du Chili, Georges Lechaptois est arrivé en France en 1983 pour suivre les cours de l’Ecole Louis-Lumière. Après une quinzaine d’années comme assistant caméra, il éclaire un premier film d’Antoine de Rosières A la belle étoile. Puis il enchaîne avec plusieurs longs métrages métrage – dont Belle épine de Rebecca Zlotowski, prix Louis Delluc 2010, Twenty Nine Palms de Bruno Dumont – et de nombreuses publicités. Il a notamment signé l’image des magnifiques publicités pour Kenzo au côté du réalisateur Patrick Guedj. Georges Lechaptois a récemment photographié le film de Mathieu Demy, Américano.
Soko dans le rôle d'Augustine - DR - ARP Selection
Soko dans le rôle d’Augustine
DR - ARP Selection

Augustine, le premier long métrage d’Alice Winocour, se passe en 1885, lorsque le professeur Charcot (Vincent Lindon) essaie de comprendre une maladie encore inconnue : l’hystérie. Augustine (Soko) va devenir un objet d’étude mais aussi de désir pour le professeur.

George Lechaptois se souvient qu’Augustine devait se tourner en été mais comme le tournage a eu lieu en hiver, il lui a fallu créer un soleil d’hiver. Et ainsi jongler entre les intérieurs qu’il éclairait comme si le soleil rentrait par les fenêtres et les extérieurs souvent très gris. Pour éclairer l’intérieur de l’hôpital, il a utilisé beaucoup de grosses sources HMI.
Contrairement à l’image classique, souvent chaude et pastel en référence au XIXe siècle, il voulait trouver une image moderne pour ce film d’époque. Il a donc opté pour une image contrastée et colorée.

Les scènes sont très découpées et le film très axé sur les personnages, la caméra les accompagnant toujours au plus près. Le découpage a été longuement préparé en amont du tournage.
L’hystérie n’est pas facile à traiter par le cadre, il faut pouvoir rendre compte des tensions et des réactions en chaîne provoquer par ces tensions. Pour ce faire, beaucoup de plans sont tournés caméra à l’épaule, il y a aussi de long travelling dans des couloirs, avec souvent pas beaucoup de lumière à la face.

George Lechaptois aime cadrer en regardant dans le viseur car il peut alors sentir les comédiens à travers l’optique. Pour lui, c’est l’œil qui fait le cadre. Il n’aime pas du tout les viseurs numériques qui font très mal aux yeux et qui devraient même être interdits. L’Alexa Studio, avec sa visée claire, n’était pas encore sortie au moment du tournage.
Il aurait voulu trouver une LUT qui aurait convenu à tous les décors du film pour que la réalisatrice ait une même image au tournage et à l’étalonnage. Ce fut difficile car tous les décors n’étaient pas encore trouvés et donc les couleurs pas encore choisies au moment des essais. Les partis pris ont été assez marqués au moment du tournage mais la question « Faut-il tout faire en postproduction ? » est à son avis toujours de mise avec le numérique. George affirme qu’il est très important d’être d’accord avec la réalisatrice sur l’image au moment du tournage et que pour cela il faut que les moniteurs soient très bien réglés. Car, malheureusement, c’est l’écran qui fait la loi maintenant sur les plateaux ! Il a donc emporté les moniteurs fournis par TSF pour les régler chez Digimage avec la LUT qui sera utilisée pour l’étalonnage. Il utilise toujours une cellule pour faire son diaph.

George Lechaptois a choisi pour Augustine une série Cooke Panchro qui ouvre à 2.8 et une série Schneider qui ouvre à 2 pour les quelques nuits du film.
L’Alexa, la machinerie et la lumière ont été louées chez TSF et la postproduction a eu lieu chez Digimage avec Serge Antony à l’étalonnage.

Georges Lechaptois et Olivier Rabourdin - Tournage de <i>Augustine</i>, d'Alice Winocour - Photo Jean-Claude Lother
Georges Lechaptois et Olivier Rabourdin
Tournage de Augustine, d’Alice Winocour - Photo Jean-Claude Lother

(Texte rédigé par Brigitte Barbier pour l’AFC après s’être entretenue avec Georges Lechaptois)