Éléonore
Paru le Contre-Champ AFC n°311
Dès que la préparation a commencé, Amro a envoyé à tous les chefs de poste un document détaillé sur la direction artistique qu’il souhaitait pour son film. Intentions visuelles pour l’image, la décoration, les costumes. Codes couleurs à l’image pour chacun des personnages et leurs évolutions. Valeurs de cadre selon les séquences. Références filmiques et captures d’écran pour la mise en scène, la photo, les looks des personnages : un document vraiment très complet. On sentait bien la méthodologie acquise lors de ses années passées à Hollywood comme assistant personnel de Michel Gondry ou de Curtis Hanson.

En nous basant sur cette bible visuelle et en gardant en tête la petitesse de nos moyens, nous avons tout d’abord découpé le film très en amont. Cela a permis à Amro Hamzawi, et aux chefs décorateurs François Renaud Labarthe et Stéphane Perazzi, de choisir des décors qui à la fois respectaient les intentions visuelles d’Amro et permettaient de satisfaire les exigences techniques de la mise en scène. De fait nous avons finalement peu eu à réadapter les intentions de découpage après les repérages. Tout ce travail s’est avéré très payant lors du tournage puisqu’il nous a libéré d’un grand nombre de questionnements sur le plateau auxquels le plan de travail serré et nos moyens ne nous auraient pas permis de répondre aussi efficacement si nous avions dû improviser. Et cela sans que pour autant la mise en scène et le jeu des comédiens ne s’en retrouvent figés. Au contraire, avoir des intentions fortes dès le départ nous donnait plus de souplesse face aux propositions diverses ou à l’inspiration du moment.

Sur le plan technique, j’ai travaillé avec la Panasonic VariCam 35, notamment pour sa fonction Dual ISO. Nous enregistrions en AVC-intra4K444. Amro Hamzawi visualisait son film en 1:2,39 mais ce n’est pas toujours évident de faire de l’anamorphique quand le budget est si limité. Toutefois la production travaillant de longue date avec Panavision Techno Alga, j’ai pu utiliser une série Techno-Zeiss. C’est-à-dire une série Zeiss Standard T2.1 sur laquelle a été ajoutée une lentille anamorphique frontale par Technovision dans les années 80 dont m’avait parlé mon ami et collègue André Chemetoff. En "taillant" le 1:1,33 nécessaire à l’anamorphose dans le 4K du capteur Super 35 de la VariCam, les courbures des bords d’image inhérentes à ce type d’optiques vintages s’atténuaient tout en conservant une définition acceptable pour une post-production en 2K. La double sensibilité de la caméra me permettait aussi de travailler avec un diaph constant autour de 4 afin de gagner en définition sur les optiques, y compris en nuit.

La direction artistique est un sujet beaucoup discuté au sein de l’AFC. Ce film est pour moi l’exemple d’un projet sur lequel une réflection aboutie produisant des intentions visuelles fortes et une communication fluide en amont permettent à tous les chefs de poste de suivre une direction artistique commune et d’apporter une vraie cohérence visuelle au récit, même avec des moyens très limités.
Bande-annonce officielle
Équipe
Premier assistant opérateur : Stephane ZajacDeuxième assistante opératrice : Gabriella Choueifaty
Troisième assistante opératrice : Eva Bedon
Chef machiniste : François Tille
Chef électricien : Gérald Durand
Etalonneur : Emiliano Serantoni
Technique
Matériel caméra : Panavision Alga (Panasonic VariCam 35, optiques anamorphiques Techno-Zeiss, format 1:2,39)Matériels éclairage et machinerie : Transpalux et Transpagrip